star fire (fredam)

Le regard rivé vers le ciel, c’est le seul moyen qu’il a trouvé pour ne pas perdre complètement pied. Il a légèrement la sensation de vertige, mais la douce brise du mois de Mai qui est encore bien trop doux à son goût a l’avantage de le faire ramener sur terre avant qu’il ne s’envole trop loin. Il soupire et ferme les yeux. Les sons vibrent autour de lui, les lumières aux couleurs excentriques pénètrent son corps et chantent à l’intérieur de son esprit. Il a déconné. Il n’est pas dans le mal, ne se sent pas particulièrement paniqué. Toutefois, de ses dernières parcelles de lucidité il sait qu’il n’est pas du tout en état de réfléchir, ou même ne serait-ce que penser correctement. Il rouvre les yeux et sent son cœur battre jusque dans ses tympans. Ce n’est pas une sensation désagréable, mais alors que le monde frémit et tremble tout autour de lui, qu’il a l’impression que ses bras volent d’eux-mêmes et que ses jambes sont toutes molles, il ne fait pas entièrement confiance en son corps. Ce n’est pas la première fois qu’il prend un taz – ou était-ce deux, voire trois ? il ne sait plus vraiment à ce stade, cerveau trop inhibé pour lui donner une réponse exacte –, et ce ne sera sûrement pas la dernière. Cependant la règle qu’une personne reste à peu près maître de ses moyens dans le groupe n’a pas été respectée. Leur Sam est complètement parti en couilles après seulement quelques bières et quelques verres de vodka, et il est encore dans un état plus sale que Freddy.

Ses pieds le portent, ou plutôt le trainent, dans la rue. Il n’est pas sûr de reconnaître le chemin, mais malgré l’ecstasy et toutes les autres merdes de coupe qui se baladent dans son organisme il semble ne pas perdre certains automatismes. Il ressent tout autour de lui. Ses sens devenus bien trop sensibles, son toucher est celui qui morfle le plus. La chair de poule partout sur son épiderme qui fait dresser ses poils sur les avant-bras, il prend de grande inspiration et plusieurs petites bouchées d’eau par intermittences régulières pour rester hydraté. Malgré ses pupilles qui sont énormes et qui a pris toute la place sur ses iris, il sait qu’il se comporte assez bien pour ne pas passer pour le dernier des pathétiques junkies. Même si au fond de lui il s’en fout bien de ce que les autres peuvent penser de lui puisqu’il se doute qu’il ne doit pas être le seul dans cet état.
Bien que ses muscles lui donnent la sensation de s’être faits la malle, ses cuisses réussissent à le mener jusqu’à la maison de sa confrérie et le monter jusqu’à un dortoir. Un dortoir dont il n’est pas sûr que ce soit véritablement le sien. Une forme dans un lit. Il est quelle heure ? La pensée lui traverserait presque l’esprit, mais il la balaie d’un revers de main aussi rapidement qu’elle est venue. Sa vision est trouble alors que ses prunelles n’arrêtent pas de tressauter, mais il n’a pas besoin de le voir avec exactitude pour savoir qui il s’apprête d’emmerder.
Il se penche, pose ses mains sur son épaule et le secoue. Hey, mec mec mec. Combien de fois il a répété mec ? Plus d’une fois, apparemment. Mais il n’est pas assez lucide pour véritablement s’en rendre compte. Il s’accroupit à côté du lit de Loam, juste pour perdre son équilibre et se retrouver le cul à terre. Débile, il ne peut s’empêcher de glousser comme un gamin. L’état d’euphorie qui ne veut pas passer, il tend une main pour attraper le poignet de son ami et se relever. Néanmoins, le geste qui parait logique et simple se stoppe soudainement lorsqu’il sent la peau chaude sous la paume de sa main. Le taz lui rit au nez et le contact se disperse dans tout son corps. Mierdas. Dis donc ton sol est vraiment confortable. T’as jamais pensé à construire ta maison dessus ?

Peut-être que Freddy a beaucoup de chance que son ami – et amant d’une fois – ne se soit pas une murge la veille comme le font habituellement les bleus, parce qu’il se serait peut-être recouvert de vomi peu ragoûtant et un peu trop liquide partout sur lui. Un très mauvais mélange avec sa sueur qui plaque déjà ses cheveux trempés sur son front ruisselant. Foutue drogue qui a monté excessivement sa température corporelle. Pas étonnant qu’il soit déshydraté. Merde, elle est où sa bouteille d’eau déjà ? Il doit aussi s’estimer très heureux qu’il ne s’offense pas d’être réveillé de la sorte et lui foutre un coup de poing dans le coin de la mâchoire. Ce qui ne serait pas très agréable puisque la drogue lui donne déjà une étrange sensation à cet endroit. Et serait-il véritablement capable de le frapper ? Il ne pense pas. Ne préfère pas le penser. De toute manière il est bien trop défoncé pour prendre tous ces détails en compte, et tout ce dont il est conscient c’est qu’il est stupidement satisfait de se retrouver sur le sol de la chambre de son pote. Gars, on est déjà dans une maison. Ses sages paroles semblent le faire réfléchir, alors que son regard se perd dans les vagues et que ses pensées s’évaporent au loin, bien incapable de les retenir et encore plus de les organiser. Ses yeux aux pupilles éclatées s’illuminent et d’un bras tout mou il vient pointer un doigt entre leurs deux visages. Oui mais c’est pas ta maison ! Tu pourrais construire ta maison dans ton dortoir. Il sait que cela n’a aucun sens. Il a encore un minimum de lucidité pour s’en apercevoir, tout au fond de lui. Cela ne l’empêche pas de l’exprimer à voix haute, parce que de toute manière il est bien incapable de contrôler son flux de paroles, ses tripes l’influençant à s’exprimer, et il explose d’un rire qu’il voudrait discret alors que sa main vient couvrir sa bouche. T’as pas trouvé ta chambre ? Air suspicieux, air mystérieux, il s’arrête soudainement de rire comme s’il essayait de retrouver sa crédibilité, bien égarée depuis longtemps sur son chemin. Qui te dit que c’est pas ma chambre ? Je viens dormir avec toi, dans ton lit maintenant. Il a besoin de contact, c’en est presque désespérant. Et même si de temps en temps il est gêné par son amitié tactile avec Loam depuis qu’ils ont cédé à leur désir sexuel, ce malaise est complètement dissipé alors que la mdma qui coule dans son sang le pousse à rechercher de l’amour et de l’affection. J'pense qu'une douche te fera le plus grand bien. Soudainement plus calme, il acquiesce avant de tendre une nouvelle fois la main pour attraper la sienne et se dresser sur ses deux pattes en arrière, les jambes encore peu sûres d’elles. La paume qui se faufile dans la grippe de son ami, il se laisse guider jusqu’à la douche, sans plus de mot. Le silence est reposant, il se laisse bercer par l’ambiance qui est soudainement plus légère que l’atmosphère inhibée et étouffante de la soirée. Le t-shirt trempé de sa sueur tombe à terre, et alors qu’il frissonne à cause de la fine couche humide et salée qui s’est déposée sur sa peau il réalise que la douche est effectivement une brillante idée. Tu restes avec moi, amigo ? Il n’a pas peur de se retrouver seul. Pas véritablement. Dans son état second il a juste besoin de contact humain. De plus, il veut s’assurer que malgré ce qu’il s’est passé entre eux leur relation n’a pas fait deux pas en arrière. Freddy s’accroche désespérément à son ami, à ses amis qu’il s’est fait.