common points (adan)

Le corps croisé sur l’herbe. Un vent chaud qui venait frapper les boucles de tes cheveux. Plusieurs heures déjà que tu étais là. Mais tu ne t’en rendais plus compte. Des coups de fusain sur un carnet tout juste acheté. Un carnet à reliure en cuir, noir. Toute en simplicité. Tu dessinais de manière rapide, des traits directs, épais. Il n’était pourtant pas compliqué de distinguer quelques traits et se rappeler des lieux. Des dessins de l’université de Brown. Des dessins architecturaux à l’ambiance funéraire. Tu soufflais. Jusqu’à ce que ce que soit des mains qui viennent souffler dans tes yeux. Un coup trop prononcé, des doigts trop fins, trop manucurés, ce ne pouvait être qu’elle. Tu passais ta main dans tes cheveux. Comme si tu essayais de retrouver un ordre dans cette chevelure emmêlée. « Je laisse mes cheveux vivre ». Tu lui balançais, un regard noir. Tu l’avais à peine regardé, continuant à nouveau tes coups de mains. Tu lui accordais peu d’importance, tu savais encore qu’elle allait te parler de ses ragots que tu ne retenais guère. Cependant. Elle te surprit. Une attention particulière. Tu te demandais si ce n’était pas faux. Une requête qui se cachait sous ses paroles. Tu haussais les épaules. « Juste quelques travaux… » tu ne la regardais toujours pas. Tu cherchais à te mémoriser le sol dur et froid des salles. Tu sentais qu’elle était toujours là. Qu’elle ne bougerait pas. Elle avait posé ses talons. Et quand elle faisait ça, c’est qu’elle était déterminée à rester. « Que veux-tu Eline ? »

Elle rigolait. Eline avait toujours eu le rire facile. Un rire moqueur, un rire hautain. C’était la petite fille vicieuse de la famille. Mais tout le monde l’aimait. Parce qu’elle souriait, qu’elle était polie, qu’elle réussissait. La parfaite qui ne comprenait pourtant rien à la vie. « Fais-moi un de tes soins capillaires alors » tu lâchais dans le vent, lui lançant un regard. Les yeux en l’air, tu les faisais rouler montrant ta lassitude. Mais elle répondait par un compliment. Et tu étais interloqué. Tu n’osais lui répondre au tac-o-tac comme tu faisais depuis son arrivée. Tu lâchais alors un merci à peine perceptible. Tu l’observais, te demandant ce qui pouvait réellement se tramer. Les arguments, les compliments continuaient. Tu sentais ton crayon tremblé. C’était un instant à inscrire dans le calendrier. C’était un instant à se remémorer des années durant. « Euh si bien sûr… » tu t’arrêtais là. Tu n’arrivais même plus à te remettre dans ton travail. Alors tu lâchais ton stylo entre les reliures du cahier. Tu débraquais tes épaules. Elle était là, ta petite sœur devant toi. Romane en serait stupéfaite, heureuse. « Je… je ne sais juste pas trop quoi te dire. Je dessinais juste au soleil ». Tu levais les yeux au ciel, observant le ciel dégagé. Tu ne savais pas comment agir. Tu avais peur de tomber une nouvelle fois dans ses pièges. La fourbe, la malicieuse. Elle savait s’y faire. Alors le loup que tu étais, se sentant menacé, restait sur ses gardes, les oreilles tendues, attendant d’être rassuré.